Chapitre 1 - L’espace-temps

L’espace-temps

L’espace usuel possède 3 dimensions spatiales, souvent nommées x, y et z. On obtient l’espace-temps en y ajoutant une dimension : le temps, souvent nommée t.

L’espace-temps a donc 3 dimensions spatiales et une dimension temporelle, ce qui en fait un espace à 4 dimensions. Ceci est tout à fait inhabituel et représente une première difficulté pour nous qui sommes habitués à observer et évoluer dans un monde en seulement 3 dimensions. Heureusement, la plupart des problèmes peuvent être compris en ne considérant que 3 dimensions à la fois.

La principale nouveauté et la seconde difficulté de l’espace-temps, par rapport à l’espace usuel, est le fait que toutes les directions de l’espace-temps n’ont pas les mêmes propriétés. En effet, les 3 dimensions spatiales usuelles sont similaires : il n’y a pas une direction qui a des propriétés physiques différentes des autres. Cependant, la dimension temporelle supplémentaire est différente. Cette seconde difficulté sera détaillée dans la partie “Géométrie dans l’espace-temps”.

Ensuite, la partie “Grandeurs physiques dans l’espace-temps” expliquera la nature de certaines grandeurs physiques élémentaires dans l’espace-temps.

Enfin, la partie “Précisions pour les espaces en 4 dimensions ou plus” donnera des détails sur un certain nombre de notions qui sont communément définies ou imaginées spécialement en 3 dimensions, ou moins, alors qu’elles peuvent être généralisées en 4 dimensions ou même plus.


Géométrie dans l’espace temps

Contrairement à l’espace usuel en 3 dimensions, dans l’espace-temps, on ne mesure pas les distances de la même façon dans toutes les directions.

Directions temporelles, spatiales, nulles

Si on a un espace en 1 dimension avec une seule direction x,

et qu’on rajoute une direction y

pour former le plan (x,y) qui est un espace en 2 dimensions,

on a non seulement ajouté la direction y mais aussi toutes les directions intermédiaires entre la direction y et la direction x.

Ensuite, lorsqu’on ajoute, la direction z,

on ajoute aussi toutes les directions intermédiaires entre la direction z et le plan (x,y).

Ces directions de l’espace usuel en 3 dimensions ont toutes les mêmes propriétés et sont dites spatiales : dans ces directions, on mesure des distances, par exemple en mètres.

Par contre, pour former l’espace-temps, on ajoute une direction t, qui est différente des autres, et est dite temporelle : dans cette direction, on mesure du temps, c’est-à-dire des “distances” en secondes, heures, jours, etc.

Comme il est difficile de représenter un espace en 4 dimensions, il est souvent utile de représenter seulement 3 dimensions à la fois, et c’est suffisant pour comprendre la plupart des problèmes. On peut par exemple représenter les directions x,y,t , sans oublier que la direction z existe toujours quelque part (elle n’est juste pas représentée sur le dessin).

Mais, comme précédemment, en ajoutant la direction t, on a aussi ajouté toutes les directions intermédiaires entre la direction t et les directions de l’espace (x,y,z). La question est donc de savoir quelles sont les propriétés de ces nouvelles directions et ce qu’on mesure dans ces directions.

Les directions qui sont exactement au milieu entre la direction t et n’importe quelle direction de l’espace (x,y,z) sont des directions dites nulles : dans ces directions, les distances mesurées sont toujours zéro (0 mètre, 0 seconde, peu importe).

L’ensemble de ces directions nulles forment un cône, appelé cône nul, qui divise l’espace-temps en trois :

Les sphères

Une sphère est l’ensemble des points qui sont à une certaine distance (le rayon de la sphère) d’un certain point (le centre de la sphère). Ceci est valable pour n’importe quel espace peu importe le nombre de dimensions, y compris l’espace-temps.

Dans les espaces usuels, les distances sont mesurées de la même façon dans toutes les directions, et une sphère est ronde. Comme pour toutes les sphères, il suffit de parcourir, en partant du centre de la sphère, une distance égale au rayon de la sphère dans n’importe quelle direction pour arriver à un point de la sphère.

Une sphère avec un rayon en mètres dans l’espace usuel (x,y,z).
Une sphère avec un rayon en mètres dans l’espace usuel (x,y,z).

Une sphère de rayon zéro est donc habituellement réduite à un seul point : le centre de la sphere.

Une sphère de rayon zéro dans l’espace usuel (x,y,z). Il s’agit en fait d’un seul point, représenté ici par une petite boule bleue pour qu’on puisse le voir.
Une sphère de rayon zéro dans l’espace usuel (x,y,z). Il s’agit en fait d’un seul point, représenté ici par une petite boule bleue pour qu’on puisse le voir.

Dans l’espace-temps, il existe des directions nulles. Or, une distance dans une direction nulle vaut toujours zéro. Donc en partant d’un certain centre, tous les points dans des directions nulles sont à distance zéro du centre. L’ensemble de ces points est le cône nul, qui est donc une sphère de rayon zéro.

Le cône nul est une sphère de rayon zéro.
Le cône nul est une sphère de rayon zéro.

Pour une sphère de rayon autre que zéro, il faut choisir un rayon en mètres ou alors en secondes, mais pas les deux à la fois.

Si on choisit un rayon en mètres, pour atteindre ce rayon, il faut forcément partir dans des directions spatiales, donc à l’extérieur du cône nul.

Une sphère avec un rayon en mètres (dessinée en gris). Elle est forcément à l’extérieur du cône nul (en bleu).
Une sphère avec un rayon en mètres (dessinée en gris). Elle est forcément à l’extérieur du cône nul (en bleu).

Si on choisit un rayon en secondes, pour atteindre ce rayon, il faut forcément partir dans des directions temporelles, donc à l’intérieur du cône nul.

Une sphère avec un rayon en secondes (dessinée en gris). Elle est forcément à l’intérieur du cône nul (en bleu). Elle est divisée en une partie “future” (la coupole en haut), et une partie “passée” (la coupole renversée en bas en transparence).
Une sphère avec un rayon en secondes (dessinée en gris). Elle est forcément à l’intérieur du cône nul (en bleu). Elle est divisée en une partie “future” (la coupole en haut), et une partie “passée” (la coupole renversée en bas en transparence).

Pour un rayon plus grand que zéro, on voit sur le dessin que plus on se rapproche du cône nul, plus il faut aller loin du centre dans une direction donnée pour atteindre le rayon de la sphère. Ceci est dû au fait que les distances mesurées deviennent de plus en plus petites, jusqu’à être exactement zéro sur le cône nul.
Sphère temporelle Sphère spatiale

Enfin, n’oublions pas que dans l’espace-temps, il existe 4 dimensions, même si on n’en représente que 3 à la fois sur un dessin. Une même sphère de l’espace-temps a ainsi une apparence différente selon les directions que l’on a choisi de représenter sur un dessin.

Une sphère avec un rayon en mètres où on représente les directions (x,y,t). La même sphère, où la direction z est dessinée et la direction t cachée.

Une sphère avec un rayon nul où on représente les directions (x,y,t). La même sphère, où la direction z est dessinée et la direction t cachée.

Une sphère avec un rayon en secondes où on représente les directions (x,y,t). La même sphère, où la direction z est dessinée et la direction t cachée.

On voit donc que les sphères de l’espace-temps sont des extensions des sphères dont on a l’habitude en 3 dimensions : elles se prolongent d’une certaine manière dans la 4ième dimension. De plus, c’est le fait d’avoir des directions nulles qui donne aux sphères une forme différente de ce dont on a l’habitude. Dans un espace en 4 dimensions toutes spatiales, les sphères auraient la forme dont on a l’habitude sur tous les dessins, peut importe les directions représentées.

Exemple des jumeaux

Deux jumeaux voyagent dans l’espace et dans le temps en partant du même endroit. L’un reste immobile dans l’espace tandis que l’autre part en voyage, en allant à plus de 200 000 km/s (proche de la vitesse de la lumière), puis revient pour retrouver son frère. Dans l’espace-temps, celui qui reste immobile dans l’espace ne se déplace que dans le temps, donc dans la direction t. L’autre se déplace à la fois dans le temps et dans l’espace, dans une direction entre la direction t et le cône nul (d’après ce qu’on sait, il n’est possible de se déplacer que dans des directions temporelles, donc à l’intérieur du cône nul, et que dans le futur).

Comme chacun des deux frères se déplace dans des directions temporelles, la “distance” qu’ils parcourent dans l’espace-temps est un temps. Ce temps est le temps qui s’écoule pour chacun.

Par exemple, celui qui voyage se déplace pendant 1 an dans la direction x de l’espace et dans le futur,

tandis que l’autre reste immobile dans l’espace pendant également 1 an.

À ce stade, comme chaque jumeau a vécu 1 an depuis leur séparation, ils sont tous les deux arrivés sur la sphère de rayon 1 an centrée sur leur point de départ commun.

De son côté, le jumeau qui voyage fait alors demi-tour (dans l’espace, pas dans le temps) et repart à la même vitesse dans l’autre sens pendant à nouveau 1 an.

Après ce voyage qui a duré 2 ans au total pour lui, il retrouve son frère qui n’a pas bougé dans l’espace mais qui a attendu 3 ans.

Il ne s’agit pas d’un quelconque artifice : au moment de leur rencontre, le frère qui a voyagé a réellement vécu 2 ans et vieilli de 2 ans, tandis que celui qui est resté immobile a vieilli de 3 ans car de son point de vue, 3 ans se sont bel et bien écoulés.

Pour pouvoir constater un tel effet, il faut que le jumeau qui voyage se déplace à une vitesse suffisamment proche de celle de la lumière. C’est pour cela qu’on n’observe pas cet effet dans la vie de tous les jours : si mon frère va travailler le matin et revient le soir alors que je suis resté à la maison, on ne s’aperçoit de rien car l’effet est vraiment très petit.

Plans usuels, mixtes, nuls

Les plans ont également des propriétés différentes selon les directions qui les composent :

 

 

 

Les cercles

Un cercle est l’ensemble des points d’un plan qui sont à une certaine distance (le rayon du cercle) d’un certain point (le centre du cercle). Un cercle est donc comme une sphère, mais restreinte à un plan : c’est l’intersection d’un plan et d’une sphère. Ceci est valable pour n’importe quel espace peu importe le nombre de dimensions, y compris l’espace-temps.

Par exemple, en deux dimensions, il n’y a qu’un seul plan possible et ce plan contient tous les points, donc les sphères sont toutes des cercles.

Dans l’espace-temps, on a vu une sphère de rayon plus grand que zéro en mètres, une sphère de rayon zéro (le cône nul), et une sphère de rayon plus grand que zéro en temps.
  

On peut donc voir à quoi ressemblent les cercles qui sont l’intersection de ces sphères avec des plans de différents types (usuels, nuls, mixtes), et lorsque le centre du cercle est dans le plan ou non.

Les cercles dans les plans usuels

Si on prend le plan usuel (x,y), un cercle est rond comme d’habitude.
 

Mais dans l’espace-temps, un cercle n’est pas toujours un simple rond comme on a l’habitude. Si le centre du cercle est dans le plan, on peut avoir une ellipse (un cercle étiré) ou juste un point.
  

Si le centre du cercle n’est pas dans le plan, on a aussi le même genre de formes (la plupart du temps des ellipses). On peut par exemple décaler le plan vers le haut sans bouger le centre du cercle.
  

Les cercles dans les plans mixtes

On a vu que les plans mixtes contiennent deux directions nulles, qui sont l’intersection du plan avec le cône nul. Cette paire de directions forment donc un cercle de rayon zéro, en forme de X, dont le centre est dans le plan, au centre du cône nul.

Les cercles de rayon plus grand que zéro sont en deux morceaux, et s’appellent des hyperboles.
 

On a le même genre de cercles dans tous les plans mixte (des hyperboles ou une paire de droites qui forment un X), que le centre du cercle soit dans le plan, comme par exemple dans le plan (x,t),
 
ou qu’il soit hors du plan. On peut par exemple décaler le plan vers l’avant sans bouger le centre du cercle.
  
 

Les cercles dans les plans nuls

Dans un plan nul, il y a une seule direction nulle, qui est l’intersection du plan avec le cône nul. Cette direction forme donc un cercle de rayon zéro, dont le centre est dans le plan, au centre du cône nul.

Toujours si le centre du cercle est dans le plan, tous les autres cercles sont formés de deux droites parallèles. Ces cercles ont tous des rayons en mètres.
 
Si le centre du cercle n’est pas dans le plan, tous les cercles sont des paraboles, que leur rayon soit en mètres, en temps, ou nul. Contrairement aux hyperboles, les paraboles sont en un seul morceau.
  

Les rotations

Une rotation est une transformation géométrique qui tourne des points. Elle est définie par un plan de rotation, un centre de rotation, et un angle de rotation.

Pour tourner un point de l’espace, on trouve le plan parallèle au plan de rotation qui passe par le point, on trouve le cercle de même centre que celui de la rotation, dans ce plan, qui passe par le point, puis on déplace le point le long de ce cercle dans le sens de la rotation jusqu’à atteindre l’angle de la rotation.

Les rotations dans les plans usuels

Dans un plan usuel, une rotation tourne le long de cercles usuels.

Les rotations dans les plans mixtes

Dans un plan mixte, une rotation déplace les points le long d’hyperboles.

Plus un point est proche du cône nul, plus l’hyperbole que le point suit lors de sa rotation ressemble à un X, jusqu’à devenir vraiment un X sur le cône nul.

De plus, la direction suivie par les différents points lors de la rotation doit être cohérente : pour la rotation prise en exemple sur les dessins, les points partent d’en bas à droite et en haut à gauche, et vont en haut à droite et en bas à gauche.

Pour une rotation qui tournerait dans l’autre sens, il faudrait inverser toutes les flèches.

Les rotations dans les plans nuls

Dans un plan nul, une rotation tourne le long de paraboles,

ou le long de droites si le centre de rotation est dans le plan de rotation.

Perpendicularité inhabituelle

Les directions x,y,z,t sont choisies pour être perpendiculaires entre elles.

Si on tourne ces directions avec n’importe quelle rotation, elles restent toujours perpendiculaires entre elles car les rotations ne changent pas les angles.

Si on tourne ces directions dans un plan de l’espace (x,y,z), comme par exemple le plan (x,y), on ne voit rien de surprenant,

mais si on les tourne dans d’autres plans, comme par exemple le plan (x,t), on voit que la perpendicularité dans l’espace-temps peut être assez inhabituelle.

En fait, on voit que la transformation qui associe à une direction du plan (x,t), la direction du plan (x,t) qui lui est perpendiculaire, est une symétrie par rapport à n’importe laquelle des deux directions nulles du plan (x,t). Donc la direction perpendiculaire à une direction nulle est elle-même car c’est son propre symétrique. De manière générale, une direction nulle est toujours perpendiculaire à elle même.


Grandeurs physiques dans l’espace-temps

Vitesse

Dans l’espace-temps, tout le monde se déplace au moins dans le futur. Si quelqu’un reste immobile dans l’espace, il voyage juste dans la direction du temps t.

Certains objets comme par exemple la lumière voyagent dans des directions nulles. Par exemple, un rayon lumineux émis dans la direction x de l’espace voyage dans la direction nulle vL qui est entre x et t, dans l’espace-temps.

Ceci nous permet de relier les unités de temps et d’espace sur nos dessins.

Donc en l’occurrence, sur les dessins, une longueur temporelle d’un an dans la direction t correspond à une distance d’une année lumière dans la direction x, soit environ 9 461 milliards de kilomètres.

On peut se placer à une échelle de temps et d’espace qu’un humain peut appréhender plus facilement en agrandissant le dessin.

La lumière se déplace à environ 300 000 km/s, et on voit que cette vitesse est liée à la direction vL dans laquelle se déplace le rayon de lumière.

Si on se déplace à 25 500 km/s, on se déplace dans une direction v plus proche de la direction t.

La vitesse est donc liée à la direction de l’espace-temps dans laquelle on se déplace.

De plus, une vitesse n’est pas plus ou moins grande dans une direction de l’espace-temps : si on se déplace deux fois plus dans une direction de l’espace-temps, on se déplace deux fois plus dans l’espace mais aussi dans le temps, donc on s’est déplacé à la même vitesse deux fois plus longtemps. Pour aller plus vite, il faut prendre une direction plus proche des directions nulles.

La vitesse d’un objet n’est donc, ni plus, ni moins, que la direction de l’espace-temps dans laquelle il voyage.

Accélération

Tous les moyens connus d’accélérer tournent la direction de l’espace-temps dans laquelle on se déplace, c’est-à-dire la vitesse. Par exemple, une accélération dans la direction x est une rotation de la vitesse dans le plan (x,t).
 

Cependant, dans le cas d’un rayon lumineux, par exemple émis dans la direction x de l’espace, sa vitesse vL ne change pas lors d’une accélération dans la direction x, car une rotation dans le plan (x,t) ne change pas la direction nulle vL.

Tous les autres objets connus voyagent dans des directions temporelles, et comme une rotation (et donc une accélération) transforme toujours une direction temporelle en une direction temporelle, on ne connait aucun moyen de voyager dans des directions spatiales ou nulles. On ne connait donc pas de moyen de dépasser la vitesse de la lumière, même avec une accélération très grande, qui ne ferait qu’approcher la vitesse de la lumière.

Référentiel d’un objet

Le référentiel d’un objet est un ensemble de directions (x,y,z,t) pour lesquelles l’objet ne se déplace que dans la direction t. C’est à dire qu’un objet est toujours immobile dans l’espace dans son propre référentiel. Dans ce référentiel, ce sont les autres objets qui bougent autour de lui. Par exemple, dans le référentiel du Soleil, la Terre tourne autour du Soleil, mais dans le référentiel de la Terre, c’est le Soleil qui tourne autour de la Terre, ce n’est qu’une question de point de vue.

Il est important de noter que la vitesse v d’un objet est toujours la direction temporelle de son propre référentiel puisque dans ce référentiel, il est immobile dans l’espace. Par exemple, le référentiel d’un objet qui voyage dans la direction t est (x,y,z,t=v).

Si cet objet accélère, sa vitesse tourne et son référentiel s’aligne avec cette nouvelle vitesse. Les différentes directions du référentiel doivent rester perpendiculaires entre elles, donc pour une accélération dans le plan (x,t), l’objet a un nouveau référentiel (x2,y,z,t2=v).

Mais dans le référentiel de l’objet, l’objet ne bouge toujours pas et c’est maintenant le reste du monde qui bouge. C’est comme si l’objet n’avait pas changé de vitesse mais que le reste du monde avait accéléré dans l’autre sens.

Jusqu’ici, tous les dessins ont été dessinés dans le référentiel (x,y,z,t), c’est pour ça que la direction t coïncide avec l’axe du cône nul.

Mais on peut dessiner le même espace depuis un autre point de vue, dans un autre référentiel. Pour cela il suffit d’appliquer à tout l’espace la bonne rotation pour passer d’un référentiel à l’autre. Par exemple, voici le même espace dessiné dans le référentiel (x2,y,z,t2) :

Il est important de comprendre qu’il s’agit du même espace avec les mêmes objets aux mêmes endroit, dessiné sous un autre point de vue. Si on avait tourné un objet par rapport à un autre, on aurait modifié la scène, mais si on tourne tout l’espace d’un bloc, c’est juste le point de vue qui change.

Exemple des jumeaux 2

Dans l’exemple des jumeaux 1, on s’était placé dans le référentiel (x,y,z,t).

C’est le référentiel du jumeau dont on disait qu’il était immobile. Mais lorsque les deux jumeaux se séparent, chacun voit l’autre s’éloigner. C’est comme lorsqu’un train démarre, les passagers à l’intérieur du train ont parfois l’impression que c’est le train d’à côté qui vient de démarrer, et cette impression est légitime car dans leur référentiel, ils voient l’autre train s’éloigner et n’ont pas l’impression de bouger. Il n’y avait donc pas forcément de raison de se placer dans le référentiel d’un des jumeaux plus que l’autre. On va donc maintenant voir ce qui se passe du point de vue de celui dont on disait qu’il voyage.

Pour ne pas les confondre, on va appeler le premier jumeau Igor (celui dont on disait qu’il était immobile) et l’autre Victor (celui dont on disait qu’il voyage).

Juste après la séparation des deux jumeaux, le référentiel de Igor est (x,y,z,t) et celui de Victor est (x2,y,z,t2). On peut dessiner cette situation dans le référentiel de Igor,

ou dans le référentiel de Victor.

On voit donc que la situation est parfaitement symétrique à ce stade : on peut considérer que Victor reste immobile et que Igor part en voyage, ou l’inverse.

Par exemple, du point de vue de Victor, le temps est mesuré dans la direction t2, donc son présent est l’espace en 3 dimensions (x2,y,z). Dans le présent de Victor, 1 an après la séparation, Igor est plus jeune que lui car il n’a pas encore atteint le bout de sa première flèche qui mesure 1 an.
 
Mais du point de vue de Igor, le temps est mesuré dans la direction t, donc son présent est l’espace en 3 dimensions (x,y,z). Donc dans le présent de Igor 1 an après la séparation, c’est Victor qui n’a pas encore atteint le bout de sa première flèche qui mesure un an et qui est donc plus jeune.
 
La situation est donc bien symétrique à ce stade.

Par contre, 1 an après la séparation, Igor continue dans la même direction, mais Victor change de direction : il accélère pour atteindre la vitesse t3. Comme Victor change de direction, son référentiel s’aligne avec cette nouvelle direction et devient (x3,y,z,t3). Lors de cette accélération, le présent de Victor change brusquement : ce n’est plus l’espace (x2,y,z) mais l’espace (x3,y,z).
Juste après le changement de direction, qui est très rapide, Victor n’a toujours vécu qu’un an après son départ, mais dans son nouveau présent, son frère a maintenant vécu plus de deux ans depuis le départ, car il est maintenant en train de parcourir sa 3ème flèche dans l’espace (x3,y,z).


Précisions pour les espaces en 4 dimensions ou plus

Les plans

Quelle que soit la dimension de l’espace, un plan est défini par deux directions. Un plan dans un espace en 4 dimensions ressemble donc exactement à un plan dans un espace en 3 dimensions. En 3 dimensions, on utilise souvent la normale à un plan P : c’est l’unique direction perpendiculaire au plan. Mais en 4 dimensions, il n’y a pas une unique direction perpendiculaire à un plan P, mais plusieurs qui sont toutes incluses dans un autre plan P. Ce plan P est donc complètement perpendiculaire au plan P, c’est à dire que n’importe quelle direction incluse dans P est perpendiculaire à n’importe quelle direction incluse dans P. Ceci n’est pas possible en 3 dimensions où deux plans ont toujours une direction en commun.

Les rotations

Une rotation est une transformation qui :

Ceci est une définition complète valable en n’importe quel nombre de dimensions.

En 3 dimensions, on a l’habitude de définir une rotation par un axe de rotation, et un angle de rotation. L’axe de rotation est l’ensemble des points fixes lors de la rotation. Ailleurs qu’en 3 dimensions, cette définition n’est pas valable car l’ensemble des points fixes lors d’une rotation n’est pas un forcément axe. Par exemple, en 2 dimensions, l’espace est un plan, et un seul point est fixe lors d’une rotation : on parle alors de rotation autour d’un point. En 4 dimensions, on peut avoir soit un plan fixe, soit un seul point fixe.

Par contre, peu importe le nombre de dimensions, on peut toujours définir une rotation dans un plan autour d’un point : pour tourner un point de l’espace, on trouve le plan parallèle au plan de rotation qui passe par le point, on trouve le cercle de même centre que celui de la rotation, dans ce plan, qui passe par le point, puis on déplace le point le long de ce cercle dans le sens de la rotation jusqu’à atteindre l’angle de la rotation.

Une telle rotation est dite simple. On parlera donc de rotations dans un plan autour d’un point et non de rotation autour d’un axe.

Dans le cas où on a 3 dimensions, le plan de rotation est le plan perpendiculaire à l’axe de rotation. Dans le cas où on n’a que 2 dimensions, l’espace tout entier est un plan et c’est le seul plan de rotation possible. Si on a moins de 2 dimensions, il n’y a pas de plan et on ne pas peut pas faire de rotations.

Les rotations (avancé)

D’après la définition d’une rotation, on voit que si on effectue plusieurs rotations les unes après les autres, la transformation totale ne déforme pas les objets et ne les inverse pas. Si la transformation totale transforme au moins un point en lui-même, elle est donc aussi une rotation, peu importe le nombre de dimensions. C’est le cas par exemple si les rotations successives partagent un même point fixe, qui est alors un point fixe de la transformation totale. À l’inverse, ce n’est pas le cas par exemple pour une succession de deux rotations d’un demi-tour dans le même plan qui n’ont pas le même centre (le résultat est une translation).

En 3 dimensions, n’importe quelle rotation est une rotation simple : elle tourne d’un certain angle dans un plan autour d’un point, comme défini plus haut. Comme une succession de rotations autour d’un même point est aussi une rotation, cela signifie que si on tourne successivement un objet dans différents plans, de différents angles, mais autour du même point, la transformation totale est toujours équivalente à une seule rotation dans un certain plan et d’un certain angle, autour de ce point. Ceci est dû au fait qu’en 3 dimensions, deux plans ont toujours une direction en commun, ce qui permet de composer deux plans de rotations pour obtenir un troisième plan de rotation équivalent.

Mais si on rajoute des dimensions, on peut trouver deux plans qui n’ont aucune direction en commun. Si on tourne un objet dans un de ces plans puis dans l’autre, la transformation totale est bien une rotation, mais pas une rotation simple car elle n’est pas équivalente à une rotation dans un plan autour d’un point et d’un certain angle. Pour représenter cette rotation, on est obligé de se souvenir des deux rotations simples qui la composent, avec leurs deux plans, leurs deux points (qui peuvent être le même), et leurs deux angles de rotations. Par contre, dans ce cas précis (deux plans de rotation qui ne partagent aucune direction), les deux rotations simples peuvent être appliquées dans n’importe quel ordre avec le même résultat, donc on n’a pas besoin de se souvenir de l’ordre.

En 4 dimensions, toute rotation se décompose en 2 rotations simples au plus, car 2 plans qui n’ont aucune direction en commun couvrent les 4 dimensions (2 par plan). Si on rajoute plus de rotations simples, il y en aura forcément deux avec une direction en commun qui pourront se réduire à une seule rotation simple, jusqu’à n’avoir plus que 2 rotations simples au plus.